Début 2017, c’était la grève des fonctionnaires et la mutinerie. La trêve sociale qui a mis fin à la crise n’a pas tenue longtemps. Depuis déjà près d’un mois, les enseignants sont en grève, du primaire à l’enseignement supérieur. Inimaginable. Le spectre de l’année blanche plane sur les élèves et étudiants sans que le gouvernement ne rechigne. Après l’emprisonnement de certains de leurs leaders, les enseignants du supérieur ont annoncé ce 20 février qu’ils mettaient fin à toutes négociations avec le gouvernement. Une nouvelle qui augure encore de longs jours de grève au sein de l’école ivoirienne.
Pourtant, d’un calme olympien, Ouattara se donne le temps d’exprimer son opinion sur le FCFA à Paris récemment ignorant dans toutes ses déclarations jusqu’à ce jour, l’asphyxie du système éducatif. Si lui semble ne pas se préoccuper de l’avenir de son pays que constituent les élèves et les étudiants, une branche de l’opposition voit cette situation d’un très mauvais œil, tandis que d’autres, ont des réactions assez surprenantes. A commencer par le tout nouvel entrant dans la classe des opposants politiques, l’ancien président de l’Assemblée nationale, Guillaume Soro. Le 19 février, un internaute l’interpelle sur tweeter afin qu’il réagisse à la situation des écoles et des universités fermées en tant que « leader générationnel ». Le Chef du Comité Politique, son nouveau mouvement politique, va réagir avec un zest d’humour qui laisse transparaitre un « je m’en foutisme » sur la situation de l’école. « Si les enseignants eux-mêmes en parlent, c’est bien ! Ne faudrait pas que je mette ma bouche dans cette affaire et on viendra me dire que depuis que je suis au chômage, je suis devenu un aigri. Moi je cherche du riz ». Un deuxième appel plus désespéré sur le réseau social l’interpelle à nouveau « pardonnez vos enfants et vos petits frères ne vont pas à l’école et risque une année blanche.
Vos frères et doyens d’universités sont en prison et ou radiés ? Svp, parlez et proposez… ». La réponse a le même ton, l’ancien PAN fait dans la rigolade. « Toi, ce matin, c’est des problèmes que tu veux me créer. Que t’ai-je fait ? Alain Lobognon vient de sortir de prison il y a deux jours et c’est moi tu veux envoyer le remplacer ? Il faut poser le problème au président du SENAT, lui au moins, il n’a pas encore été chassé de son poste ». De l’ironie qui tance sous cape, le régime en place de sévir par l’emprisonnement. Mais peut on rire de l’éducation de nos enfants ? En tout état de cause, celui qui a prétendu quitter le « tabouret » pour aller chercher le « fauteuil », entendez par là, le fauteuil présidentiel, trouve le moyen de plaisanter avec l’éducation des enfants de ce pays qu’il envisage de gouverner. Son silence lui aurait été profitable que cette plaisanterie de mauvais gout.
Le silence, c’est d’ailleurs ce que nous avons pu observer de la part du très pédant Mamadou Koulibaly, lui aussi ancien président de l’Assemblée nationale. Si on ne peut expliquer ce silence, on sait au moins que la tête de file de LIDER était plongée dans un grand débat sur le FCFA à la suite de la déclaration du Chef de l’Etat sur la question. Et lors de sa récente vidéo de tous les jeudis sur les réseaux sociaux, il s’est plutôt attelé à dévoiler les plans d’Alassane Ouattara pour préserver le pouvoir en 2020. Des révélations trop lourdes pour se donner le temps de jeter un coup d’œil à la situation des élèves et étudiants désœuvrés par la grève.
Heureusement qu’il y a encore des opposants qui ont la mesure des priorités. Et pas des moindres. L’ancienne première dame, Simone Gbagbo reçu récemment en liesse dans sa région natale à Bonoua n’a pas manqué de soutenir les enseignants qui font la grève. Pour elle, leur grève est une lutte pour la Côte d’Ivoire qu’il faut soutenir. Dans le même élan, le FPI à travers une déclaration a condamné l’inaction des autorités. Attitude propice à faire perdurer cette crise qui était pourtant « prévisible dès lors que les promesses de la trève sociale arrachée aux enseignants n’ont pas été tenues », déplore la branche du FPI d’Assoa Adou. Le parti a appelé « le gouvernement à engager au plus vite des négociations directes avec toutes les parties concernées par cette crise qui n’a que trop duré ». Mais ces nombreux appels semblent ne pas trouver écho auprès du régime d’Alassane Ouattara, qui ne fait que durcir le ton avec l’emprisonnement récent des certains leaders syndicaux. Une démarche que dénonce avec véhémence, la coalition politique Ensemble pour la démocratie et la Souveraineté : « EDS dénonce l’option prise par les autorités de tutelle, de brandir la carte des menaces en lieu et place de propositions concrètes ».
Des propositions concrètes, une table de discussions, et un ciel qui s’éclaircit à nouveau sur un système éducatif déjà en souffrance de nombreux maux, afin que les enfants de ce pays reprennent le chemin de l’école. Ce sentier, le gouvernement ne l’a pas encore appréhender et continue de naviguer à contrecourant au grand dam des parents d’élèves et de leurs progénitures qui pour certains, trouveront durant ces jours sans école, le chemin des sentiers de la perdition. Ne dit-on pas que l’ennui est la mère de tous les vices…. En tout état de cause, la FESCI ne compte pas s’ennuyer et pourrait embraser l’atmosphère sociale si elle se mettait à son tour en grève. Son secrétaire général Assi Fulgence exigeait récemment la reprise des cours. « Nous avons déjà payé nos droits d’inscription ». Un avertissement dont chacun peut peser l’ampleur…
Kouakou Kouamé